Le 5 novembre 2018, Jacques Crahay, CEO de Cosucra, prend la parole devant un parterre de politiciens et de dirigeants à l’occasion de sa prise de fonction en tant que nouveau Président de l’Union Wallonne des Entreprises (UWE). Le message qu’il transmet n’est pas convenu. Plutôt que de parler de croissance ou de compétitivité, le patron des patrons wallons interpelle ses collègues en parlant d’un nouveau modèle économique et social à inventer et d’entreprises au service de l’humain.
Vous trouverez sur cette page l’accès à la vidéo du discours qu’il a donné à Louvain-La-Neuve (Belgique) le 5 novembre et le texte intégral de son discours. Choisissez le média qui vous conviendra le mieux.
Si vous souhaitez un accès direct à certaines parties du discours, en voici le plan avec les indications du minutage :
- 0 min : Introduction
- 2 min42 : Une nouvelle ère est en gestation
- 6 min 44 : 3 chantiers pour un nouveau monde :
- 6 min44 : L’énergie et les matières premières
- 14 min52 : Nos relations humaines
- 17 min57 : L’évolution technologique
- 26 min23 : Rôles de l’UWE pour les trois prochaines années
- 29 min37 : Les autres priorités
- 32 min57 : Conclusion
Le texte intégral se trouve sous l’image ci-dessous. Pour démarrer la vidéo, cliquez sur l’image ci-dessous.
Texte intégral du discours
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Voici quelques mois que je prépare ce discours et, devant la complexité du monde et des sujets, je me suis posé beaucoup de questions sur les défis futurs qui nous concernent comme entrepreneurs et comme entrepreneurs engagés dans la construction d’une Wallonie forte et prospère.
Je veux vous inviter avec moi à la réflexion. Je ne vous proposerai pas de solution, ni un programme, seulement un plan d’action. Comme vous l’avez entendu avec Odyssée Wallonie, nous souhaiterions construire un programme avec vous dans les mois qui viennent et apporter les réponses que nous désirons à la situation. J’essaierai ici de planter le décor.
Comme point de départ, je veux partager avec vous ma conviction personnelle, forgée autour de mon expérience acquise dans notre entreprise familiale et à travers des choix de produits, de procédés, d’organisation humaine et de maîtrise du numérique que nous devrons poser dans les années qui viennent.
Ma thèse est en effet que seule une activité économique sociétalement et environnementalement soutenable aboutira à assurer pour nos générations futures la prospérité de la Wallonie et à maintenir, voire améliorer son excellent cadre de vie. Nous en avons la responsabilité devant les générations Y et Z qui sont déjà là et qui nous observent.
D’abord, je vous décrirai en mes termes l’urgence de la situation. Puis, j’exposerai trois domaines de réflexion qui pourraient faire la base d’une future économie régionale durable. Je terminerai en rendant concrètes les actions collectives que j’envisage pour l’UWE durant cette présidence.
La situation est urgente… une nouvelle ère est en gestation
Nous savons que la société est en mutation profonde. Nous assistons à la fin d’une ère, d’un modèle de société et de son développement qui a duré au moins les 200 dernières années. Depuis une décennie au moins, un nouveau monde est en train de naître sous nos yeux, sans que nous le distinguions encore précisément. Nous sommes en train de vivre un moment très particulier de l’humanité !
Les raisons de ces changements fondamentaux tiennent principalement à une évidence que nous pressentons tous individuellement mais qui a beaucoup de difficulté à émerger dans la société.
Depuis plus de 50 ans au moins, nous avons pleinement conscience que notre terre et ses ressources fossiles sont limitées. Et que petit à petit, elles s’épuisent… C’était déjà pressenti dans le rapport Meadows du Club de Rome en 1972, mis à jour en 2004.
Et pourtant ce rapport qui a reçu énormément d’attention, a été largement ignoré dans les faits.
Savoir n’est pas croire.
Nous avons aujourd’hui conscience que la biodiversité s’appauvrit autour de nous.
Et pourtant, malgré nos efforts pour diminuer la pollution des sols et des eaux, nous sommes loin de savoir quoi faire pour inverser cette tendance.
Nous observons que le climat change et nous reconnaissons que c’est en grande partie de notre fait… (à une exception notoire près !).
Et pourtant à l’échelle mondiale, toutes les tentatives pour décarboner notre planète sont aujourd’hui sans effet probant : malgré l’établissement de quotas, les rejets de carbone dans l’atmosphère sont toujours en augmentation au niveau mondial. A noter toutefois que depuis 1990, la Wallonie a diminué ses émissions de CO2 de 40%, et l’industrie de 57%.
Nous constatons que le niveau de vie moyen de la population mondiale n’a cessé de croître ces dernières décennies. La durée de vie s’allonge et la population mondiale devrait atteindre 10 milliards en 2050, créant de nouveaux besoins et défis.
Et pourtant, les inégalités dans le monde subsistent. Encore une fois, nous pouvons nous réjouir que la Belgique fasse partie des pays les plus égalitaires de l’Europe des 28.
Une nouvelle ère est en gestation. Nous observons notre vieux bateau prendre l’eau de toutes parts, nous le savons : il y a urgence. Allons-nous subir sans réagir ? Si nous n’agissons pas suffisamment, c’est parce que nous n’avons pas encore de réponse adéquate. Comme le dit autrement le paléontologue Pascal Picq,
« L’homme est un grand singe qui n’abandonne pas la branche sur laquelle il est assis avant de pouvoir attraper l’autre »
Pascal Picq
Pour pouvoir atteindre l’autre branche, celle de ce nouveau monde, il nous faut réfléchir ensemble. Je vais détailler trois chantiers qui sont à mes yeux nécessaires de travailler rapidement : l’énergie et les ressources, l’évolution de nos relations humaines et l’émergence de nouveaux modèles, supportés notamment par la technologie numérique. Après en avoir tiré les conséquences, je dégagerai trois pistes d’action.
Le premier chantier est celui de l’énergie et des matières premières non-renouvelables
L’énergie et les matières premières sont régies par des marchés qui en fixent le prix. Au-delà des soubresauts de l’économie mondiale et de la croissance de nombreux pays émergents, ce prix ne pourra échapper à sa contrainte majeure : le caractère limité des ressources fossiles. J’y ajouterai un impact de l’exploitation de ces ressources toujours plus marqué sur l’environnement.
Il me semble raisonnable de se préparer dès maintenant à des événements que nous avons déjà connus dernièrement, juste avant la crise de 2008 : un prix des énergies fossiles cher et donc, lié comme frère et sœur, un prix des matières premières coûteux.
Ce constat allié aux contraintes du défi climatique a deux conséquences qui nous mettent devant une opportunité majeure d’entrer dans une ère économique et sociale nouvelle.
La première conséquence à tirer, c’est que rien n’est moins cher qu’une énergie et des matières premières qui ne sont pas consommées. En tant qu’entrepreneurs, nous en sommes déjà bien conscients. Nous sommes déjà bien engagés dans la réduction de la consommation d’énergie, particulièrement à travers les accords de branche. Nous innovons et investissons sans cesse, notamment dans la cogénération ou les énergies renouvelables pour réduire l’empreinte carbone. De même que nous nous attachons à ce que les reliquats de nos productions soient recyclés ou bio-dégradés. De nombreuses technologies de production et de stockage d’énergie renouvelable se développent rapidement. Espérons que de nouveaux modes de mobilité s’imposent aussi rapidement.
Ces exemples sont les premiers souffles du vaste mouvement qui prendra chaque jour une ampleur plus grande pour concilier l’indispensable activité économique avec les exigences d’une planète aux ressources limitées.
La seconde conséquence est, me semble-t-il, que cela appelle à faire évoluer également notre modèle économique et social. Et que la transition énergétique doit être solidement accélérée à la fois dans notre région et dans toutes nos entreprises.
En fait, nous pourrions raisonner d’une façon nouvelle : une économie soutenable peut équilibrer ses prélèvements au même rythme que ce que la Nature peut les régénérer.
En Région wallonne, nous avons des entreprises qui raisonnent déjà avec ces nouveaux modèles économiques : certaines appliquent l’économie circulaire, d’autres étudient la bio-économie ou encore l’économie de la fonctionnalité et de la coopération et l’économie bleue. De grandes entreprises pratiquent chaque jour le ‘craddle to craddle’ littéralement « du berceau au berceau » et l’analyse du cycle de vie des produits… elles conjuguent toutes efficience et coopération dans un cycle sans gaspillage. Et toutes utilisent le modèle de la Nature pour s’inspirer. D’ailleurs une nouvelle branche de la science, popularisée par la scientifique américaine Jeanine Benyus, étudie le biomimétisme. Chez nous, Gauthier Chapelle est un brillant promoteur de cette science naissante.
Nous avons une fenêtre exceptionnelle d’opportunité dans notre pays pour les choix d’investissement en sources d’énergie. Par exemple, nous devons réfléchir à des cycles énergétiques pour stocker l’énergie renouvelable intermittente de manière durable et économiquement rentable. Ne pourrions-nous pas rassembler les intervenants et conseiller les décideurs avec les meilleures options ?
Nous avons dans nos Universités, Hautes Ecoles et centres de recherches, des scientifiques de haut niveau parfaitement à même d’étudier et déjà à l’œuvre pour appréhender ces nouvelles façons de concevoir et étudier la production et les cycles, de manière interdisciplinaire et transversale. Concrétiser les résultats de la recherche dans nos entreprises est un défi majeur pour lequel les six pôles de compétitivité ont été créés et autour desquels nous nous rassemblons depuis 12 ans pour imaginer cet avenir et promouvoir l’innovation. C’est l’innovation qui à partir des connaissances et des idées, permet de les transformer en produits commerciaux répondant aux besoins futurs du marché.
Je souhaite que durant l’année prochaine, nous consacrions du temps entre nous pour réfléchir à ces enjeux de manière concrètes afin que, et dans nos entreprises et dans notre région, nous puissions entrer de plein pied dans cette nouvelle économie. Bien sûr, la Wallonie n’est pas une île isolée du reste du monde et nous devons déterminer quelle est notre avantage compétitif dans cet effort mondial.
Pour être incité à agir dans ce sens, le levier financier doit être utilisé : des discussions doivent être menées avec nos dirigeants pour reparcourir les externalités, les taxations et les incitants qui leur sont liés.
Et comme nouvelle motivation de nos décisions d’entrepreneurs, je propose d’intensifier le critère de soutenabilité des activités qui, en toute logique, pourrait être intégré dans la mission de nos entreprises. C’est dans cette direction que vont les sociétés qui respectent une charte de responsabilité sociétale ou qui appliquent les objectifs de développement durable de l’ONU ou encore les sociétés qui sont certifiées B-Corp. Et des mouvements soutenus par l’ONU comme le One Planet Summit 2018 donnent lieu à de nombreuses nouvelles initiatives qui peuvent nous inspirer.
Enfin, pour les consommateurs et citoyens que nous sommes aussi, nous devons inventer un mode de vie très différent, passant par des changements de comportements qui, plus ils seront rapides, moins ils seront contraints et forcés. Je pense particulièrement à la mobilité urbaine.
Ce bouleversement dans nos finalités, nos habitudes et modes de pensée, est un défi extraordinaire et urgent. C’est notre force à nous entrepreneurs, de nous adapter, de résoudre des problèmes et de relever ce type de défi. Travaillons-y ensemble.
La stimulation de l’entrepreneuriat revêtira dès lors un sens et une importance cruciale. Encourageons nos jeunes entrepreneurs à s’investir dans cette voie ! Et je souhaite que les autres parties prenantes, qu’elles soient politiques, financières ou civiles nous encouragent dans cette voie et contribuent à découvrir les solutions.
Le deuxième chantier a trait à l’évolution de nos relations humaines.
Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, nous avons connu une période de croissance qui nous a permis d’accéder à un niveau de vie jamais atteint.
Depuis quelque temps cependant, j’observe qu’une partie de notre population, particulièrement des jeunes et d’autres aussi sont en quête de sens. Ils plaident pour plus d’autonomie et de responsabilités personnelles.
Nous voyons poindre là une volonté de soigner la qualité de vie et la relation humaine, y compris dans le milieu du travail.
Quand nous avons la chance d’avoir pu rencontrer nos besoins essentiels, nous voyons de nouvelles aspirations apparaître : créer, être utile aux autres, se réaliser et prendre du temps pour les siens. Nos entreprises doivent tenir compte de ces aspirations et proposer des emplois inclusifs, porteurs de sens et de valeurs.
Ainsi, la coopération et l’entraide entre personnes au sein de l’entreprise aideront, me semble-t-il, à une compétition saine. L’opposition et la contradiction céderont le pas devant la solidarité, le partenariat, l’intelligence collective et la mise en réseau de nos moyens humains pour construire notre vivre ensemble.
Inspirées par un compatriote, Frédéric Laloux, beaucoup de nos entreprises se transforment maintenant en organisations co-opératives où les relations humaines sont davantage basées sur la confiance, et non plus sur le commandement et le contrôle.
Dans notre entreprise à Cosucra, nous nous sommes engagés sur ce chemin depuis trois ans. Je suis tous les jours enthousiasmé par l’énergie que ce changement d’attitude nous apporte dans notre rapport humain, grâce à la confiance retrouvée.
Il s’agit pour nous de nous développer dans une économie qui nous apporte une véritable qualité de vie et qui construit des relations solides et vraies.
L’entreprise évoluera alors vers un modèle davantage ouvert, permettant la réalisation de soi dans des buts collectifs nobles et en phase avec la société. Ensemble, grâce à notre intelligence collective et le co-développement, nous serons créatifs et produirons de la valeur durable dans nos entreprises.
Enfin, le troisième chantier concerne l’évolution technologique et en particulier la technologie numérique.
D’après Michel Serres, c’est notre troisième révolution anthropologique : après le passage de l’oral à l’écrit, puis de l’écrit à l’imprimerie, le numérique imprime des changements colossaux au niveau social mais aussi dans nos cerveaux.
C’est cette évolution numérique qui pourra faire le lien entre les deux chantiers précédents, entre notre nouveau modèle économique et social soutenable et le développement de relations humaines épanouies. On l’appelle d’ailleurs de plus en plus l’Intelligence Augmentée.
Nous parviendrons à utiliser cette technologie numérique sereinement afin de la mettre au service de l’économie de la connaissance. Comme toutes les autres technologies, elle ne sert pas d’alibi pour la résolution de nos problèmes actuels, ni comme une technologie à laquelle il faut s’adapter à tout prix pour espérer continuer comme avant.
Ces technologies numériques doivent être au service de l’humain. Si nous domptons et maîtrisons ces outils numériques comme l’ébéniste le ciseau à bois, alors oui, ils se révéleront puissants pour la création, la diffusion et l’utilisation de la connaissance. Nous pourrons ainsi développer l’économie de la connaissance dont ses ressources sont infinies. Cette économie nouvelle donnera de la valeur aux objets, aux procédés et aux services créés grâce à leur contenu de connaissances, c’est-à-dire la somme de nos intelligences que l’on aura pu y mettre.
Trois chantiers pour un nouveau modèle
Si nous Wallons, avons été pionniers dans la révolution industrielle mondiale au XIXème siècle, nous pouvons aussi être pionniers et inventeurs géniaux dans cette nouvelle économie décarbonée, circulaire, pourvoyeuse d’emplois, innovante dans nos relations humaines et créative dans l’efficience.
Grâce à ces trois chantiers, j’aspire à ce que nous soyons capables de créer les leaders mondiaux d’une nouvelle génération dans nos domaines d’expertises. Parce que notre socle pour le succès reste notre capacité à exporter nos savoir-faire et nos connaissances, grâce à l’innovation et notre faculté de promouvoir de nouvelles relations humaines au sein des entreprises, pour l’épanouissement des employés.
Et quel meilleur relais que l’entreprise pour organiser ce nouveau modèle ?
Notre Région est constituée de 77.000 entreprises avec à leur tête 77.000 entrepreneurs leaders
Les entrepreneurs sont des héros au quotidien ! Sans doute, sont-ils peu reconnus pour le courage et l’énergie qu’ils mettent dans l’entreprise de leur vie. La prise de risque et les responsabilités sont souvent bien mal appréciées.
Tous les jours, vous êtes en proie à l’angoisse du carnet de commande, à l’inquiétude sur la qualité de vos produits, aux mille et un tracas d’une entreprise humaine collective dont vous avez la charge, la véritable responsabilité. Un jour, vous pestez contre des charges administratives trop lourdes, un autre, vous manquez de main-d’œuvre qualifiée. Et pourtant, tous les jours vous faites face, avec obstination et énergie.
L’Union Wallonne des Entreprises est là pour vous rendre la vie plus aisée. En tant que Président, je continuerai à œuvrer, avec l’équipe à mes côtés, pour que votre rôle soit reconnu, pour que votre environnement social, politique, administratif et culturel vous facilite la vie.
Mais vous n’êtes pas seulement des producteurs de biens et services, vous jouissez d’une influence que vous sous-estimez beaucoup : vous êtes leaders d’une communauté qui croit en vous et qui attend de vous que vous donniez du sens au travail, que vous montriez l’exemple et que vous participiez à formuler des réponses aux interrogations sur l’avenir de notre société et de nos entreprises.
Vous deviendrez ainsi les guides de cette nouvelle économie soutenable et efficiente. Vous deviendrez les leaders inspirants d’une communauté de personnes de plus en plus engagées et heureuses de pouvoir participer à une entreprise qui donne du sens.
Des dizaines de start-up et spin-off ont été créées ces dernières années, fruits des efforts de tous dans la promotion de l’entrepreneuriat. Ces jeunes entreprises imprègnent leur fonctionnement et leurs produits et services de leurs aspirations à de nouveaux modèles de production, d’échange et de relations humaines. Il en faut encore beaucoup d’autres. J’aurai à cœur de renforcer les écosystèmes entrepreneuriaux en Wallonie, là où ils se développent, dans des provinces, villes, quartiers et campagnes.
Profitons de la chance et de la grâce que nous avons d’habiter dans ce coin du monde préservé, avec une organisation de société libre qui offre tant de possibilités en éducation, en soins de santé, en sécurité et en infrastructures.
Tentons d’atteindre l’excellence dans l’offre de formation que notre Communauté et ses enseignants prodiguent. Agissons pour que chaque jeune trouve sa voie et puisse la réaliser. Donnons à notre génération montante, touchée par le virus de l’entrepreneuriat, la pleine possibilité d’utiliser ses compétences et sa créativité et de créer ainsi de la connaissance et de la valeur.
Qu’ils soient conscients que notre village, notre ville, notre région, notre pays, le monde attend leurs talents. Nous, les plus âgés, devons les accompagner, les soutenir, leur montrer l’exemple et ne pas les laisser avec un état du monde sur lequel nous aurions jeté l’éponge. Donnons-leur espoir, envie et fierté d’entreprendre et contribuer concrètement à ce nouveau monde auquel nous aspirons.
Nous pourrons ainsi vérifier avec eux la maxime de Marc Twain : « Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait ! »
Je vous invite à prendre conscience chacun individuellement du moment que nous vivons. Je vous invite à réaliser tout ce que cela signifie pour vous, personnellement, et pour votre entreprise. En vous posant la question :
- Si ce n’est pas moi, alors qui ?
- Si ce n’est pas maintenant, alors quand ?
Prenons ainsi nos responsabilités devant tous et devant nos enfants, et pour les générations à venir. Car si nous arrivons à être précurseurs dans ce mouvement, ne doutons pas un instant que nous y trouverons encore plus d’opportunités ultérieures.
Rôle de l’UWE pour les trois prochaines années
J’en arrive enfin à vous énoncer mon rôle pour les trois prochaines années. Ce rôle sera mené avec les principes que j’ai énoncés en regard des trois chantiers décrits :
– En lien avec le premier chantier, celui de l’énergie et des ressources, des actions concrètes seront nécessaires pour accompagner les entreprises : l’UWE continuera à influer, particulièrement pour assurer une transition énergétique responsable, décidée, réaliste et sans retour en arrière. A court terme, nous devons rester attentifs à la sécurité d’approvisionnement ainsi qu’à la compétitivité avec les autres régions d’Europe. L’innovation dans ce domaine doit être promue pour développer des services et des produits répondant aux défis de demain,
– En regard du deuxième chantier, celui de la réappropriation de nos relations humaines, je souhaite continuer à promouvoir et à soutenir, au sein de l’UWE, les initiatives d’innovations managériales chez les entrepreneurs et dans les entreprises, comme nous l’avons fait pour la cinquième fois cet après-midi.
– Pour le troisième chantier de la numérisation et de la connaissance, l’UWE soutiendra les programmes qui encouragent les entreprises à s’inscrire dans la quatrième révolution industrielle, tant technologique qu’organisationnelle. Je pense aux 6 pôles de compétitivité et au programme « made different /digital Wallonia » qui a déjà sensibilisé et accompagné de multiples entreprises vers l’industrie 4.0.
– En lien avec tous ces chantiers, je souhaite inscrire nos entrepreneurs dans l’activité prospective annoncée durant l’année 2019, Odyssée Wallonie. Elle définira le futur modèle économique et social de nos entreprises. Chacun d’entre nous sera invité à y participer localement comme vous l’a annoncé Olivier ce soir.
– Par ailleurs, je compte œuvrer à mettre en réseau les différentes organisations patronales pour utiliser de manière encore plus efficiente leurs ressources et leurs compétences au service des entreprises et de la société :
o En rapprochant notre organisation des chambres de commerce wallonne comme relais locaux indispensables à une réflexion de proximité,
o En proposant l’UWE comme coordinateur des fédérations membres afin d’être force de proposition et acteurs proactifs dans les défis que je viens de décrire,
o Et enfin en construisant ensemble avec nos organisations-sœurs fédérales, bruxelloise et flamandes une vision commune sur notre transition énergétique et sur notre mobilité à l’échelle nationale.
Autres priorités
Enfin, je m’attèlerai aussi à défendre toutes les autres priorités qui restent les nôtres et qu’Yves nous a déjà rappelées. Yves, j’en profite pour te remercier chaleureusement de nous transmettre une UWE alerte, revigorée et pleine de projets. Je te souhaite plein succès pour les nombreux défis que tu continues de te mettre.
Avant de terminer, je vous rappelle brièvement ces priorités principales :
L’adéquation des compétences reste un chantier capital pour notre économie. Résoudre l’équation de 30.000 emplois vacants et de 220.000 demandeurs d’emploi est la priorité immédiate parce que le développement de nombreuses entreprises en est freiné. Les mesures prises par les gouvernements actuels pour lutter contre les métiers en pénurie et en forte tension vont évidemment dans le bon sens et doivent continuer d’être soutenues, accélérées même. La réforme de l’enseignement reste un chantier de toute première priorité et que nous supportons du mieux que nous pouvons.
Le climat social est aussi un point d’attention fort pour nous car il est le préalable indispensable à la concertation sociale. Sans un climat social serein, pas de développement économique durable. Et il y a d’autres façons d’y arriver qu’en faisant des grèves pénalisant les entreprises. Laissons les forces positives s’épanouir : nous tendons la main au banc syndical afin de créer un climat pro-entrepreneuriat et pour développer cette culture entrepreneuriale qui est un facteur d’épanouissement économique profitable à tous.
Des améliorations sont constatées dans l’efficience des services publics et nous nous en réjouissons. Certes, l’indispensable orientation client devra encore passer par un travail législatif de meilleure qualité, une modernisation de la fonction publique et la transformation digitale.
Le déploiement industriel est aussi prioritaire, car une industrie puissante est le socle d’une économie prospère. La mutation industrielle est en cours dans de nombreux secteurs : l’arrivée de Thunder Power à Gosselies est un bel exemple de redéploiement. Nous souhaitons qu’il soit non seulement générateur d’emplois, mais devienne aussi fédérateur d’un écosystème innovant, faisant travailler ensemble et en cocréation les différents partenaires dans la recherche et la sous-traitance.
Et enfin, nous devons mobiliser le territoire pour répondre aux besoins économiques, démographiques et de mobilité.
Le focus sur ces priorités ne fera que renforcer la spirale positive dans laquelle la Wallonie se trouve aujourd’hui, même si cela ne se traduit pas encore directement dans les chiffres. Les indicateurs s’améliorent, même s’il reste un long chemin à parcourir.
Conclusion
La Wallonie change et progresse, elle montre qu’elle peut se relever. Les fondations sur lesquelles on peut construire existent : capitalisons sur celles-ci !
On en voit des exemples tous les jours : des outils financiers qui se modernisent, le focus sur la croissance des entreprises qui ont un effet structurant et créateur de valeur ajoutée, une administration plus sensible aux entreprises, des écosystèmes déjà performants ou en devenir, le soutien d’une culture entrepreneuriale.
Le politique ne peut pas tout, l’esprit collectif doit changer et comprendre que le développement de la Wallonie passera par les entrepreneurs et le développement des entreprises.
Une fois de plus, nous devons profiter des atouts de la Wallonie : sa géographie idéale, ses entreprises de renommée mondiale, le dynamisme de ses entrepreneurs et de ses pôles universitaires, ses centres de recherche performants, ses collaborateurs de haut niveau et bien formés.
Voilà les engagements auxquels je souscris pour ce mandat à la Présidence de l’UWE pour les trois prochaines années.
A l’issue de ce discours, j’espère sincèrement que nous prendrons ce soir, chacun dans son rôle et tous ensemble, la résolution de nous engager solidairement dans cette noble cause qu’est l’avenir de notre région, de notre communauté et de nos entreprises.
Je vous remercie de votre attention soutenue.
Jacques Crahay, Président de l’Union Wallonne des Entreprises
Louvain-la-Neuve, 5 novembre 2018
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Que votre vie soit belle,
Pierre de Lovinfosse
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