La transition préoccupe de plus en plus d’habitants de notre planète. Passer d’une économie dopée au carbone à l’économie du renouvelable, passer des énergies fossiles aux énergies vertes, basculer du capitalisme à … (à quoi d’ailleurs ?), de la voiture au vélo, de la croissance à la décroissance, de la mondialisation au local… tout fait farine au moulin de la transition. Il faut dire que l’enjeu est de taille : si nous ne transitons pas ou pas assez vite, le déluge nous est promis. Nous en avons, ces dernières années, de plus en plus d’avant-goûts… amers.
Les scientifiques (chapeau à eux au passage) nous annoncent le problème depuis bon nombre d’années avec des modèles d’une complexité inouïe qui se vérifient de plus en plus. Il faut dire que nous avons du recul : le rapport Meadows (une étude scientifique publié en 1972 qui calcule les limites de la croissance sur terre) fête cette année ses 50 ans.
Même si, à la base, mes études d’ingénieurs, me prédestinaient plutôt à attaquer cette question par les sciences, c’est l’humain qui m’intéresse actuellement (vous savez probablement que j’ai mal tourné et que je suis devenu coach suite à ma crise d’adolescence en 2014 : certains sont plus lents que d’autres…).
Quand je nous observe, nous les humains, face à la transition, je vois plusieurs réactions.
Les réactions reptiliennes
Il y a d’abord les réactions de survie. Devant une menace, notre cerveau reptilien nous propose trois réactions bien connues : l’attaque, la fuite et la passivité.
L’attaque
Pas facile d’attaquer une inondation, une canicule, la migration… et toutes les autres manifestations annonçant le problème et confirmant qu’il y en a bien un. On peut évidemment se protéger en construisant des digues plus élevées ou des villes climatisées (après les stades…), mettre des glaçons dans l’océan pour le refroidir, placer toutes les espèces en voies d’extinction dans des zoos, ériger des clôtures pour que les migrants ne puissent plus passer… C’est la lutte contre les symptômes qui apparaissent de plus en plus nombreux sur le corps de cette grande malade qu’est notre chère terre.
Pour d’autres l’attaque est plus simple : il suffit de tirer sur les messagers. Plus de messager, plus de message, plus de problème ! Bien sûr ils ne vont pas assassiner ces « messagers de l’apocalypse », ils ne sont pas des sauvages. Il suffit simplement de crier au complot, de les décrédibiliser ou tout simplement de dire l’inverse de ce qu’ils affirment en trouvant sur le net quelqu’un qui est du même avis que moi et l’affirme avec beaucoup d’aplomb, quelques chiffres et une histoire bien tournée. Nous autres, les humains, aimons croire ceux qui nous disent que nous ne devons rien changer.
La fuite… en avant
Certains se bouchent les oreilles. Ils en ont marre des rapports et des discours alarmants et préfèrent les ignorer :
« Allez manifester ailleurs ! »
Pour échapper aux cris de « Greta l’hystérique », ils auront tendance à accélérer vers toujours plus de croissance, de consommation, de richesses… De toute façon le progrès scientifique arrangera tout, pourquoi s’en faire.
Ils tentent d’ignorer le problème et pratiquent le déni pour pourvoir continuer à dormir en paix. C’est un peu comme si, quand l’alarme incendie de votre maison se met à sonner parce que le feu a pris dans la cuisine, vous la coupez pour pouvoir poursuivre en toute sérénité une bonne et longue nuit de sommeil (éternel ?).
La passivité
Conscients de l’importance du problème et de la menace, beaucoup se sentent totalement impuissants.
« Qu’est-ce que je peux y faire ? Et même si je faisais tout ce qu’il faut pour réduire au maximum mon emprunte carbone, ce ne serait qu’une fraction de goutte d’eau dans l’océan des changements nécessaires pour inverser la tendance. »
Et donc, plutôt que de se priver pour rien, continuons, tant qu’il joue, à profiter de l’orchestre… du Titanic.
Personnellement, je me reconnais souvent dans cette dernière catégorie.
Et puis il y a ceux qui se sont mis en chemin
Face à la dérive mortelle du navire « Terre », de plus en plus de femmes et d’hommes se sont mis à ramer dans l’autre sens, certains depuis de nombreuses années, souvent sous la risée des « reptiliens-attaquants ». Ils ont changé leur mode de vie pour respecter davantage cette terre qui les porte et les nourrit. Ce sont ces fractions de goutte d’eau dont je vous parlais plus haut.
Je pense à Bénédicte et Denis qui, inspirés entre autres par Pierre Rabhi, ont quitté une carrière internationale et de très gros revenus au service d’une multinationale pour créer dans leur jardin un centre de formation à la permaculture, pour partager leur amour de la nature, soigner les cœurs et être ferment de partage dans leur quartier (www.cth-scrl.be). Non seulement cela fonctionne, mais il est clair que pour rien au monde ils ne voudraient revenir à leur vie antérieure. Leur « décroissance » les a tellement enrichis et fait grandir.
Je pense aussi à des clients, ces patrons qui depuis des années transforment leur entreprise pour qu’elle devienne un lieu de vie et d’épanouissement pour tous.
Je pense à celles et ceux qui réfléchissent et mettent toute leur créativité pour trouver d’autres façons de fonctionner, des voies respectueuses de celle qui nous porte avec tant d’amour depuis si longtemps.
Certains font des choix radicaux, d’autres y vont par petits pas.
La transition intérieure
Ce qui me frappe chez les personnes que je connais personnellement et qui sont en chemin, c’est que, pour la plupart d’entre elles, tout commence par une remise en question personnelle, une recherche intérieure, un cri du cœur enfin entendu. Tout commence par une transition intérieure. Ce qu’ils font, ils ne le font pas par peur d’un effondrement potentiel, ils le font par goût de la vie, par une profonde envie de vivre pleinement ce qu’ils ont perçu profondément en eux. Lorsque je me mets à l’écoute du cœur de mon cœur, j’entends un appel à la vie.
Cette transition intérieure c’est ce chemin qui quitte l’ego pour découvrir cet être unique que je suis vraiment, ce « je suis » comme j’aime à l’appeler. Autant l’ego lutte pour ma survie, propulsé par mes peurs, peur du manque, peur du rejet, peur du vide, peur de ne pas être assez, peur de ne pas être reconnu… autant le « je suis » se bat pour la Vie, pour toutes les vies, propulsé par l’amour de soi, des autres et du tout-autre. Le chemin qu’ils ont entamé, n’est pas un chemin de misère, de peines, de souffrances, c’est bien au contraire un chemin de vie et d’enrichissement.
Vous avez dit décroissance ?
La décroissance, cela vous tente ?
Moi, pas du tout.
Oui, philosophiquement ou spirituellement, je peux me faire de beaux discours qui expliquent combien la décroissance est la voix noble. Ne sommes-nous pas tous appelés à mourir tôt ou tard ? N’est-ce pas le cycle de la vie ?
Le problème, c’est que mon instinct me pousse à maximiser le plaisir et à minimiser la douleur. Alors quand j’entends « décroissance », tout en moi se bloque et il me faut de grands efforts pour parvenir à lever quelque peu ces freins qui rapidement se remettent en place.
– Mais en fait de quelle décroissance parle-t-on ?
– La décroissance du PIB bien sûr, tout le monde sait cela !
– Rappelle-moi, c’est quoi encore ce PIB qui devrait absolument croître sans fin ?
Voix off :
« Le produit intérieur brut (PIB) est l’indicateur économique qui permet de quantifier la valeur totale de la « production de richesse » annuelle effectuée par les agents économiques (ménages, entreprises, administrations publiques) résidant à l’intérieur d’un territoire. »
Wikipedia
– Il s’agit donc bien de richesse. Donc si nous nous engageons dans la décroissance, nous serons moins riches. Mais de quelle richesse parle-t-on ?
– D’Euros évidemment !
– Et le bien-être de celles et ceux que j’aime, la santé physique et mentale, la beauté de la nature, l’art, l’entraide, la famille, l’avenir de nos enfants, le chemin spirituel, le beau, le bon, le vrai, la joie, le partage, l’amour… ? Tout cela n’est donc pas pris en compte dans notre sacrosainte croissance !
Timothée Parrique
« Ce qui compte ne peut pas toujours être compté,
et ce qui est compté ne compte pas forcément. »
Et si la croissance du PIB nous appauvrissait plutôt que de nous enrichir ? Si depuis tant d’années que nous avons le regard figé sur l’évolution de ce PIB, nous nous étions aussi fortement appauvris ?
Dans l’urgence de la crise des années 30, Simon Kuznets, un théoricien de la croissance, inventa le PIB en 1934 à la demande du congrès américain. A la base, il s’agit donc d’un indicateur de crise économique. Il était lui-même très conscient des limites de ce PIB et du danger qu’il y a à l’utiliser comme un objectif en soi.
« L’objectif d’augmenter la croissance
Simon Kuznets
devrait spécifier la nature et la finalité de cette croissance. »
Personnellement, la croissance du PIB m’est bien égal : l’argent n’est qu’un moyen. Le problème c’est que depuis longtemps dans notre monde occidental, l’accumulation d’argent est devenue pour beaucoup une fin en soi. Cet appétit insatiable a généré de trop nombreuses inégalités, des injustices et aussi de la pauvreté, chez nous et surtout dans les pays du sud. Il suffit de regarder notre monde d’un peu plus près.
Je me souviens d’une conversation que j’ai eu avec mon père alors que, à la fin des années 90, je venais de devenir associé dans l’entreprise où je travaillais. Je lui parlais avec admiration de ces entrepreneurs qui créaient des entreprises et les revendaient quelques années plus tard pour des centaines de millions d’Euros. Il m’a regardé en me disant tout simplement :
« Pour quoi ?»
Eh bien pour faire fortune, bien sûr ! Et là encore un second « pour quoi ? » a sonné. Dans l’entreprise textile fondée par mon grand-père dans les années 30 et à la tête de laquelle mon père et son frère ainé se sont retrouvés, le but n’était pas d’enrichir les actionnaires, ça c’était une conséquence lorsque le business était bon. Le but de l’entreprise était de donner du travail aux femmes et aux hommes des environs et de répondre avec des produits de qualité aux besoins des clients. Je n’ai jamais oublié cette conversation. Car même après la faillite, alors qu’il avait tout perdu, il a continué à s’occuper des autres en priorité, et surtout des plus faibles.
Si chacun répond pour lui-même au jeu des « pour quoi ?» en cascade, nous arrivons tous à la même réponse : notre « pour quoi » le plus profond, c’est le bonheur, le nôtre et celui de celles et ceux qui nous sont chers. Le problème, c’est que nous sommes nombreux à avoir profondément en nous la croyance que pour être heureux et rendre nos proches heureux il faut beaucoup d’Euros, toujours plus d’Euros. Quel mensonge ! Au lieu de mesurer le bien-être et le bonheur auquel nous aspirons profondément, nous comptons des Euros et nous finissons par croire qu’en faisant de la sorte nous mesurons le niveau de bonheur. Encore un mensonge.
Et la décroissance alors…
Dans son article qui résume la « Théorie du Donut » de Kate Raworth, Benoît nous explique comment l’utilisation annuelle des ressources de la planète devrait se situer entre deux limites :
- Le fondement social, c’est-à-dire le minimum permettant de remplir équitablement les besoins de base de tous les humains ;
- Le plafond écologique, c’est-à-dire la quantité de ressources que notre planète produit annuellement.
Les scientifiques ont démontré que dans bien des domaines ces limites sont largement dépassées. Si rien ne change, l’avenir qu’ils nous annoncent n’est pas vraiment enviable.
Poursuivre la politique de croissance du PIB, c’est un peu comme si le conducteur d’une voiture se limitait à en mesurer uniquement la vitesse en ayant pour objectif de la maintenir au-dessus de 100 km/h. Que sa voiture aille droit dans le mur ou dans la bonne direction, ne le préoccupe pas, tant que la vitesse reste au-dessus de son objectif, tout est bon pour lui. Tout le monde traiterait un tel conducteur de danger public.
N’est-ce pas ce que nous faisons depuis des décennies ?
Même si le terme est difficile à accepter, il me parait évident aujourd’hui que la décroissance est une nécessité. Soit nous la subirons, soit nous en ferons une opportunité pour créer une nouvelle société, plus humaine, plus juste, plus respectueuse du vivant. Je crois qu’il est important d’en prendre conscience.
N’ayant pas les compétences pour creuser davantage ce thème de la décroissance, je vous propose au bas de cet article quelques liens vers des vidéos, des livres ou des articles qui vous permettront d’approfondir le sujet.
La bonne nouvelle c’est que :
« Ce que l’on doit faire pour survivre
Timothée Parrique
est également ce que l’on doit faire pour mieux vivre. »
Personnellement, ce qui me parait essentiel c’est la croissance du bon, du beau et du vrai, la croissance de notre authenticité, de notre capacité à mieux vivre ensemble, à partager et à nous aimer au-delà de nos différences. S’engager dans la transition, c’est choisir la croissance de ce que tout être humain désire profondément en lui, c’est se libérer de nos fausses croyances, d’une vision réductrice de la vie, c’est sortir du cul de sac dans lequel notre monde s’est engagé. Pour accueillir ce monde « post-croissance » comme l’appelle Timothée Parrique, nous sommes invités à nous alléger, à lâcher ces pseudos lingots d’or qui nous entrainent vers le fond.
Et vous, où en êtes-vous ? Qu’en pensez-vous ? Que ressentez-vous ? N’hésitez pas à laisser un commentaire sous cet article pour nous partager votre ressenti ou des liens qui vous ont inspirés ou éclairés.
A bientôt,
Pierre
Des liens pour aller plus loin :
- Ralentir ou périr, l’économie de la décroissance de Timothée Parrique aux éditions Le Seuil, 2022 (français, 320 pages).
- Décroissance et Néodécroissance, l’engagement militant pour sortir de l’économisme écocidaire de Laurent Lievens aux Presses Universitaires de Louvain, 2022 (français, 250 pages).
- Un Donut pour sauver le monde, article de Benoît Thiran.
- Les deux articles de Benoît Thiran sur le « Travail Qui Relie », une démarche de cheminement en groupe dont le but est de soutenir le désir de prendre part à la transition et la capacité à participer à la guérison de notre monde.
- Ralentir ou périr : à quoi ressemblerait une société post-croissance ? – Interview de Timothée Parrique sur Blast (vidéo en français, 44min).
- HEC Paris Transition Series: « Ralentir ou Périr » Timothée Parrique (vidéo en français, 1h11, fin de l’intro à 6min).
- HEC TALKS : With Emmanuel Faber, Chair of the International Sustainability Standards Board (ISSB) (vidéo en anglais, l’intro commence à la minute 15, le discours d’Emmanuel Faber débute à la minute 22 et dure 20 minutes, ensuite un temps de Q&A).
© Photos dans l’ordre : Timo Volz, Mabel Amber, Jeyaratnam Caniceus, Gerd Altmann, Jae Bano, inconnu, Gerd Altmann
Merci Pierre pour cet article très intéressant qui remet l’essentiel au centre du débat 🙂
Décroissance économique et croissance du coeur, voilà une piste qui me parle. Merci Pierre pour cet article clair qui remet un peu d’ordre dans mes idées. Vivement le 9 mars qu’on approfondisse tout cela 😀
Avant tout, merci Pierre pour cet article qui pose bien le sujet.
Plusieurs de tes interrogations me sont également familières sans que je puisse apporter grand chose au débat
Comme demandé en fin d’article, je te propose juste d’apporter une toute petite touche personnelle à ta question finale : ou en suis-je ?
Il y a 40 ans déjà, en tant qu’étudiant en sciences économiques et gestion, j’avais déjà un avis sceptique sur la dimension scientifique de l’économie qui nous était imposée (même si je ne le comprenais pas avec la même clarté d’esprit que Kate Raworth ! ). J’ai toujours dit à tous que j’avais plus appris sur « comment bien gérer ? » au contact de mes parents dans le cadre de leur exploitation agricole que à l’université. Rappeler maintenant que économie signifie au départ gérer sa maison me fait ainsi du sens !
A bien y repenser, les vérités économiques reçues de mes parents étaient multiples :
– fais de ton mieux (vise le progrès) mais accepte que le c’est la terre qui décide (et entre autre la météo) – respecte-là car elle te nourrit – sois fier de lui appartenir
– l’accumulation d’argent ne se calcule que dans des visions longues et même très longues : on ne regarde pas son portefeuille au jour le jour, au mois le mois – tout au plus, fait-on une synthèse annuelle – une récolte est meilleure, une autre moins bonne, on parlera d’une bonne année ou d’une moins bonne – l’enrichissement de la terre vaut autant que la récolte et ne se mesure que sur le long terme – l’amélioration des rendements ou la sélection d’une meilleure race de bovin est mesuré sur des dizaines d’années ou même une carrière – le patrimoine (la richesse en argent) a été reçu des générations précédentes et sera transmis à la suivante (vision circulaire et non en flèche)
– le cadre de vie est austère (solitude dans la campagne, pas de vacances, pas de sortie longue le dimanche car traite des animaux chaque soir…) : la richesse est avant tout dans le contact humain avec le facteur chaque matin, les gens du village, les autres agriculteurs à qui on demande de l’aide et on en donne en retour
– le cercle familial est la richesse la plus importante. La connaissance des origines est omni-présente (un tel est le neveu de celui-ci qui a épousé celle-là…) et ceci est vrai aussi pour les animaux élevés (cette jument est la fille de cet étalon qui vient de telle ferme…)
– la débrouillardise est omni présente et en particulier réutiliser les objets devenus inutiles
– l’évolution après guerre est mauvaise pour le métier d’agriculteur – « cherche un autre métier, fais des études » : Derrière cette rengaine, c’est l’introduction du capital dans le métier qui était perçue comme destructrice. En effet c’est devenu une nécessité pour le fermier de faire un emprunt en banque pour acheter ses terres. Alors que la terre était par le passé (XIXème) un bien à faible valeur détenu par des familles riches qui n’étaient pas dans l’obligation de la vendre pour payer des droits de succession. En effet la terre avait une faible valeur. La hausse de la valeur de la terre est entre autre la conséquence des expropriations suite à densification des activités humaines et en particulier les villes, les autoroutes….
Au delà de devoir s’endetter pour acheter ses terres, le fermier a été poussé à l’endettement pour se mécaniser (supprimer l’emploi d’ouvriers) dans des proportions invraisemblables. Une exploitation agricole aujourd’hui est l’activité économique avec le plus mauvais ratio entre création de valeur ajoutée (nombre de ménages nourris) et niveau d’investissement.
– l’évolution après guerre est mauvaise pour le métier d’agriculteur – quelques puissants décident du prix mondial du blé sans prendre en compte la valeur réelle de ce produit que la terre nous donne. Il n’y a pas de prise en compte des aspects locaux (météo, coût de la vie, qualité de la terre pour ce type de production…) Ceci fait penser au prix du pétrole qui lui aussi est fixé mondialement et sur base du coût de production sans prise en compte de l’impact sur la terre dans sa globalité.
Cette « dernière » génération de terriens agriculteurs détenait donc quelques règles économiques pertinentes mais s’est complètement trompée (a été complètement trompée) au moins sur deux sujets :
– produisons plus car des enfants meurent tous les jours au tiers-monde (les ONG se sont là aussi bien trompées, me semble-t-il)
– utilisons des produits chimiques pour produire plus
Ils doivent se retourner dans leur tombe d’avoir été ainsi si naïfs, manipulés par ce modèle économique du progrès.
Ou en suis-je donc ?
Mon point d’entrée personnel est cette volonté de faire mémoire de ces générations de terriens agriculteurs et éleveurs qui ont quelque chose à nous transmettre aujourd’hui (un peu comme les Peuples Racines) sur le respect de la terre, l’aspect circulaire de la vie (saisons, vie et mort…), la sobriété, la richesse du contact humain, la volonté de toujours évoluer pour s’adapter, le métier universel de jardinier…
A petite échelle, j’essaye d’entretenir un cercle familial entre tous mes neveux et nièces et de cultiver discrètement cette mémoire. J’ai ainsi écrit 51 lettres à date, accumulant anecdotes, souvenirs, photos, traces diverses. Je suis sur le point de me relancer à l’écriture.
J’espère ainsi avoir un peu répondu à ta demande
Merci François pour ton témoignage qui me touche beaucoup. Il y a beaucoup d’inspiration à recevoir dans le mode de vie de nos anciens pour créer notre futur, un futur qui nous ramènera à l’essentiel dans le respect de soi, des autres et de notre planête.
Pierre