Déléguer, le levier indispensable du manager

par | 3 Sep 2020 | Gestion d'équipe, Motivation | 0 commentaires

Si, comme beaucoup, vous éprouvez des difficultés à déléguer, cet article est pour vous. Si je suis manager et que j’ai tendance à tout faire moi-même, c’est un peu comme si je conduisais une voiture sans arriver à passer la seconde : mon moteur surchauffe, fait beaucoup de bruit et ma voiture est à la traîne.  Si cette voiture était la mienne, ce ne serait pas trop grave. Mais en fait, ce n’est pas ma voiture. C’est un autocar, voir un train, qui emmène toute mon équipe ou mon entreprise : si je n’arrive pas à déléguer, c’est donc toute mon équipe, mon entreprise que je ralentis.

Voici ce que me disait cette semaine encore une cliente qui, auparavant, avait bien du mal à déléguer :

« J’ai commencé à déléguer des tâches à une collaboratrice avec qui j’avais une relation assez superficielle. A partir de ce moment-là, j’ai découvert une autre personne. La confiance que je lui ai faite lui a permis de développer sa confiance en elle. Elle s’est épanouie et sa confiance lui a permis de dépasser ses peurs. Aujourd’hui, mon regard sur elle a complètement changé. »

Des témoignages comme celui-ci, j’en ai régulièrement de la part de celles et ceux qui ont réussi à dépasser leurs difficultés à déléguer.

3 bénéfices de la délégation

  1. Du temps

Le premier bénéfice de la délégation est bien évidemment le fait de libérer du temps. Tout le temps gagné par des tâches faites par d’autres, me permet de consacrer mon temps à ce qui est vraiment essentiel, à ce qui est prioritaire pour moi au boulot et dans ma vie privée. Les managers qui n’arrivent pas à déléguer ont trop souvent le nez dans le guidon, n’arrivent pas à prendre de la hauteur, ce qui est pourtant un de leurs rôles essentiels, et ont du mal à donner du temps à leurs proches.

  1.  La performance

Pour reprendre l’analogie de l’autocar, lorsque je ne délègue pas suffisamment, je suis un frein pour les autres qui sont obligés d’attendre que j’aie fait le job qu’ils auraient très bien pu faire à ma place. Il s’agit donc aussi de déléguer pour cesser d’être un frein ou autrement dit pour développer la performance de mon équipe, de mon entreprise.

  1. La motivation

La délégation a aussi un impact essentiel sur le collaborateur à qui je confie la tâche : elle lui permet de trouver plus facilement la motivation, de développer ses compétences et donc aussi sa confiance en lui. En déléguant, vous responsabilisez, vous permettez à vos collaborateurs de prendre des initiatives et de s’épanouir.

En résumé, déléguer, c’est tout bénéfice pour tout le monde.

Alors pourquoi c’est si difficile pour certains ? 5 freins à la délégation

Voici 5 freins parmi ceux que je rencontre le plus fréquemment en coaching. Il y en a d’autres, mais ceux-ci me paraissent les plus importants :

  1. Manque de confiance : c’est certainement l’obstacle principal à la délégation. «Je veux que ce soit parfait et je doute que mon collaborateur soit aussi méticuleux que moi.»  

Comme je ne délègue pas, les compétences et la motivation de mes collaborateurs ont tendance à régresser ce qui conforte ma croyance que mes collaborateurs ne feront pas les choses avec autant de soin que moi. Je suis dans un cercle vicieux que j’alimente jour après jour.

Pour lever ce premier frein, Oussama Ammar, co-fondateur de « The Family », un incubateur de startups, nous propose de développer la croyance suivante :

« Chaque tâche que je fais, quelqu’un peut le faire mieux que moi. »

Oussama Ammar
  1. Manque de temps : il faut que cela aille vite. Dans ma tête je me dis : « Expliquer ce que j’attends à mon collaborateur, faire le suivi sans parler du fait qu’il est plus lent que moi (ma croyance ?), me prendra beaucoup de temps. Je perdrai moins de temps en le faisant moi-même ».

Le problème, c’est que la tâche se répète. s’il est vrai que la première fois, le fait de donner les explications et peut-être même d’accompagner quelque peu mon collaborateur m’aurait pris autant de temps que de le faire moi-même, voir plus, les fois suivantes j’aurais certainement gagné du temps. Prendre le temps de déléguer est un investissement : il faut semer avant de récolter.

  1. Manque de compétence dans mon équipe : Je pense que : « je suis le seul à pouvoir faire cela, mes collaborateurs n’ont pas les compétences et l’expérience suffisante ».

Ici aussi j’alimente le même cercle vicieux que celui généré par le manque de confiance.

  1. Je dois être fort : « en tant que chef, je dois montrer que je sais tout faire, que je sais m’en tirer seul ».

Je rencontre régulièrement des patrons qui ont ce « driver » (référence aux 5 drivers de Taibi Kahler). Ils ont la conviction qu’ils doivent être capable d’effectuer toutes les tâches demandées à leurs collaborateurs et bien plus. De ce fait, ils sont eux-mêmes le frein au développement de leur entreprise qui se voit limitée aux compétences du patron.

  1. Manque de savoir-faire : « je ne sais pas comment déléguer efficacement, donc je vais le faire moi-même ».

 Nous reviendrons sur ce point dans la suite de cet article.

Je vous invite à prendre conscience de votre frein. Peut-être en avez-vous plusieurs. Ensuite, c’est à vous de voir : vous voulez gagner du temps, être plus efficace, booster la motivation et la performance de vos équipes ? Si oui, levez vos freins ! Si vous le désirez, mais que vous n’y arrivez pas, choisissez un bon coach pour vous aider.

Déléguer en 4 étapes

En fonction de la complexité de la tâche à déléguer, du niveau de compétence, d’expérience et d’autonomie du collaborateur, le processus de délégation sera très simple ou plus long.

Par exemple, si vous voulez demander à un de vos collaborateurs d’écrire une synthèse de la réunion à laquelle lui et vous allez participer dans la journée, le processus complet que je vous présente dans ce paragraphe est bien sûr trop lourd, par contre, je vous invite à toujours veiller à :

  • Commencer par le pourquoi, le sens et l’importance de la tâche ;
  • Définir concrètement ce que vous attendez ;
  • Définir concrètement ce que vous attendez ;
  • Demander et recevoir un accord clair de votre collaborateur.

Dans l’exemple ci-dessus, cela pourrait donner la demande suivante :

« Bonjour Jean, le patron m’a demandé de le tenir au courant des conclusions de notre réunion de cet après-midi avec notre client X (le pourquoi), pourrais-tu en réaliser une synthèse par mail en maximum 20 lignes reprenant uniquement les points essentiels et les décisions et la lui envoyer en me mettant en copie ? (mes attentes) Il a besoin de cette synthèse au plus tard vendredi à midi (le timing). Si tu souhaites que je la relise avant, je suis à ta disposition. C’est OK pour toi (accord du collaborateur) ? »

Au cas où la tâche que vous décidez de déléguer est plus conséquente et surtout si votre collaborateur est moins expérimenté, je vous propose un processus plus complet qui vous évitera bien des malentendus. Il permettra aussi à votre collaborateur de récolter tous les fruits de cette délégation. A vous de l’adapter à chaque situation.

Ce processus comporte 4 étapes :

  1. La préparation
  2. L’entretien de délégation
  3. Le suivi
  4. Le débriefing

La préparation :

Il est important avant d’aborder mon collaborateur de réfléchir à plusieurs aspects essentiels pour que cela fonctionne :

  • Quoi ? Quel est exactement la tâche que je veux déléguer ?
  • A qui ? Pour vérifier si le collaborateur auquel vous pensez est le bon, posez-vous trois questions. A-t-il :
    • Le savoir (compétences et expériences)
    • Le vouloir (sa motivation pour ce type de tâche)
    • Le pouvoir (les moyens nécessaires : temps, outils, support…)
  • Pourquoi ? Assurez-vous que la tâche que vous déléguez ait un sens, une plus-value pour l’entreprise. Pourquoi est-elle importante ? Pour qui ? Qu’est-ce qui se passe si cette tâche n’est pas faite ? … Si vous n’avez pas de réponses à ces questions, ne déléguez pas :  laissez tomber cette tâche, elle est inutile.
  • Objectifs ? Qu’attendez-vous comme résultat ? Quels délivrables sont requis ? Quels sont les critères de réussite ?…
  • Degré d’autonomie ? En fonction du niveau du collaborateur et de votre capacité à faire confiance, définissez le niveau d’autonomie qui conviendra aux deux parties : suffisant pour que votre collaborateur soit motivé et en assurant une fréquence de reporting ou de suivi qui vous permettra de gérer votre besoin d’être rassuré. Plus vous déléguerez, plus vous apprendrez à faire confiance, plus votre besoin de contrôle diminuera, plus l’autonomie et la motivation de vos collaborateurs augmenteront. Classiquement, la littérature reprend 4 niveaux d’autonomie :
    • Je décide et tu fais ce que je te dis ;
    • Tu me tiens informé à chaque étape du processus ;
    • Tu m’informes quand c’est fini ;
    • Tu as carte blanche.

Il est évident que si vous pratiquez le niveau 1 avec un collaborateur senior cela va mal se passer. De même, si vous laissez carte blanche à un junior inexpérimenté, il ira droit dans le mur.

  • Moyens nécessaires ? Quels moyens devez-vous prévoir pour que votre collaborateur puisse réussir ? Il s’agit ici de réfléchir aux moyens dont votre collaborateur ne dispose pas encore et que vous lui fournirez. Pensez entre autre au temps et au support.

L’entretien de délégation :

Quand j’étais enfant, j’ai plusieurs fois entendu mon grand-père dire :

« Un ordre mal exécuté est souvent un ordre mal donné »

Par conséquent, si la tache est complexe ou si votre collaborateur est relativement peu expérimenté, prenez le temps nécessaire pour lui expliquer ce que vous attendez de lui et ensuite répondre à ses questions. Les étapes de cet entretien pourraient par exemple être les suivantes :

  • Commencer par le pourquoi : j’explique le sens de ce que je demande, pourquoi c’est important.
  • Présentation de la mission.
  • Explication des objectifs, des résultats attendus et des délivrables. Pensez SMART (Spécifiques, Mesurables, Acceptés, Réalistes et définis dans le Temps).
  • Niveau de reporting attendu (autonomie).
  • Reconnaissance : « J’ai pensé à toi parce que… ». Profitez de la délégation pour donner de la reconnaissance, un levier essentiel de motivation.
  • Discussion ouverte avec le collaborateur : « qu’en penses-tu ? », « qu’as-tu besoin pour y arriver ? », « quelles sont tes craintes ? »…
  • Accord du collaborateur. Si vous n’avez pas son accord pour la mission et sur les objectifs, votre collaborateur n’est pas engagé.

Le suivi :

En fonction du degré d’autonomie que vous aurez décidé, vous pratiquerez le suivi des tâches déléguées.

Le débriefing :

Lorsque la tâche est terminée, n’omettez pas le débriefing. Faites le point avec votre collaborateur sur ce qu’il a appris, les compétences qu’il a acquises et donnez-lui de la reconnaissance. Il en sera d’autant plus demandeur de nouvelles tâches que vous lui déléguerez avec plaisir.

Condition sine qua non

Si je vous demande s’il vous arrive de vous tromper ou de faire des erreurs, votre réponse sera plus que probablement affirmative. De même, vos collaborateurs feront des erreurs. Il arrivera donc qu’ils échouent dans la réalisation d’une tâche que vous leur aurez déléguée. Si vous n’êtes pas prêt à accepter cela, votre frein « Manque de confiance » ou « Manque de compétence » restera bloqué et la délégation sera très difficile.

« Lorsque l’échec n’est pas envisageable, créativité, apprentissage et innovation disparaissent »

Brené Brown

Je vous invite donc à mettre votre collaborateur à l’aise en lui disant qu’il a droit à l’erreur et que vous restez responsable du résultat. Invitez-le à revenir vers vous en cas de problèmes en l’assurant que vous serez là, non pas pour lui faire passer un mauvais quart d’heure, mais au contraire pour trouver ensemble des solutions.

Attention à la ménagerie…

Enfin pour terminer et vous inciter davantage encore, si nécessaire, à responsabiliser vos collaborateurs, je voudrais vous présenter la métaphore du singe sur l’épaule que vous connaissez peut-être déjà.

Chaque fois qu’une personne entre dans votre bureau ou vous téléphone pour vous confier un problème, je vous invite à voir ce problème comme un singe sur l’épaule de cette personne. Tout au long de l’entretien, veillez attentivement à ce que le singe reste toujours sur l’épaule de votre interlocuteur et ne vienne pas s’installer sur la vôtre. Certains managers, surtout ceux qui délèguent difficilement, on tendance à prendre sur eux tous les problèmes que leurs collaborateurs viennent leur présenter. Finalement leur bureau devient une véritable ménagerie remplie de singes criant et sautant dans tous les sens.

Après la lecture de cet article, je vous invite à vous arrêter quelques secondes pour identifier tous les singes qui se promènent sur vos épaules ou dans votre bureau. Qu’allez-vous en faire ? Pour chacun d’entre eux, décidez à qui vous allez demander d’en prendre soin ?

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Que votre journée soit belle,

Pierre

Illustrations : Dimitris Vetsikas, Michel Ange, Kanenori, inconnu

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L’auteur

Pierre de Lovinfosse

Pierre de Lovinfosse

Coaching individuel, de groupe et formations. Il s’est donné pour mission d’aider les dirigeants à mettre leur entreprise au service de l’humain : l’entreprise comme ressource pour l’humanité, plutôt que l’homme comme ressource pour l’entreprise. Il s’intéresse tout particulièrement à la problématique du leadership qui constitue son sujet principal de coaching et de formations. https://www.effatacoaching.com

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